Parcours patrimoine
Le moulin des Béchets
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Le plus pittoresque moulin du Loiret
Particulièrement pittoresque dans son écrin d’arbres, avec son arche de pierre abritant sa grande roue, le moulin des Béchets a été peint par de nombreux artistes : Charles Pensée, bien sûr, qui l’a peint pour ses Vues de monuments des bords du Loiret (1845), mais aussi un peintre un peu oublié aujourd’hui mais qui eut son heure de Gloire, Louis François Hippolyte Ribbrol, professeur de dessin à Orléans dans plusieurs établissements, qui exposa au Salon à Paris en 1880 un beau tableau représentant le moulin des Béchets. Ce tableau fait aujourd’hui partie des collections de l’ancien hôpital de la Madeleine à Orléans.
Racheté au XVIe siècle par les religieuses du monastère orléanais de la Madeleine, c’était alors un riche moulin à blé, doté de terres adjacentes, et qui, à la fin du XVIIIe siècle, rapportait annuellement aux soeurs 800 livres en argent, 40 livres de poissons et 12 canards (ce qui représentait, pour le meunier d’alors, Jean-Jacques Bigot, un loyer conséquent).
Lors de sa vente en 1790 comme bien national, il est racheté par Avoye Pinchinat, propriétaire du château de la Fontaine, et affermé au meunier qui l’exploitait depuis plusieurs années, Jean-Jacques Bigot, puis au fils de ce dernier. La guerre de 14-18 allait mettre fin à son activité meunière.
La vie mouvementée du petit pont des Béchets
Longtemps le moulin des Béchets resta d’un accès difficile : côté sud les chaussées qui le reliaient au coteau étaient souvent inondées, ce qui fait que les religieuses étaient obligées de fournir une embarcation à leur meunier. Et côté nord, il y avait le pont des Béchets construit par les religieuses de la Madeleine qui s’en réservaient jalousement l’usage sous l’Ancien Régime. Ce pont des Béchets est par la suite devenu un chemin vicinal puis communal et un point de passage très utilisé par les habitants pour traverser le Loiret et rejoindre la route de La Fontaine. Il a connu bien des vicissitudes : détruit par les Prussiens pendant la guerre de 1870, la commune ne pouvait subvenir à la dépense nécessitée par sa reconstruction ; elle sollicita donc une subvention du Conseil Général et en 1876 entreprit la reconstruction en bois du pont.
En 1916, la Première Guerre mondiale occasionna d’autres dégâts : « Le pont des Béchets, établi sur la rivière du Loiret et dépendant du chemin vicinal ordinaire N°11 de la commune d’Olivet a été écrasé le 17 janvier 1916 sous l’action du passage de camions automobiles militaires lourdement chargés. Les mesures nécessaires pour le rétablissement de la circulation sur le chemin, qui est de la plus grande importance pour la région, ont été prises et la municipalité d’Olivet a décidé la reconstruction en ciment armé du tablier du pont dont il s’agit. Son exécution coûtera 18 000 francs. Or pour y faire face, M. le Maire d’Olivet ne dispose que de 75000 francs sur les ressources actuelles de la vicinalité ; une subvention du ministère de la Guerre reste très improbable, dans la mesure où il n’accepte pas de reconnaître sa responsabilité dans l’effondrement du pont… » Le maire qui était alors Albert Barbier sollicitait donc le Conseil Général pour qu’il apporte une subvention pour le quart de la dépense. Subvention accordée au vu de l’importance que
représentait ce point de passage pour la commune.
En 1942, le pont des Béchets menaçait à nouveau ruines et les défenseurs du patrimoine s’inquiétèrent alors des projets modernes de reconstruction. Mais par chance, notre pont des Béchets, quoique doté d’un solide tablier en béton, a conservé tous ses charmes dans son cadre idyllique.
Les moulins et les inondations
On voit, au fil de l’histoire, que les chaussées qui reliaient le moulin des Béchets au coteau d’Olivet étaient souvent inondées et demeuraient impraticables pendant de longues périodes. C’est que notre Loiret, de lui-même, reste assez sage et modéré, ne provoquant en cas de fortes pluies que des débordements dans les prairies voisines, entravant certes le travail des meuniers qui voyaient leurs digues, passerelles et déversoirs noyés. Mais lorsque la Loire se mettait de la partie et, sortant de son lit et crevant ses levées, rejoignait le Loiret, cela engendrait de terribles catastrophes. L’eau pouvait alors monter à plus de 2 mètres dans les maisons du village, noyant le bétail et emportant les moulins. Parmi ces très grandes crues qui atteignirent Olivet, plusieurs ont laissé des traces dans notre histoire, comme celle de de 1527 dont l’historien orléanais François Lemaire rappelait l’ampleur en 1645 : « En 1527, la Loyre desborda, noya hommes et enfants et bestes et se joignit avec le Loiret, dont nos pères retiennent ce distique :
L’an mil cinq cens vingt sept
S’assembla Loyre et Loiret. »
En 1567, un nouveau débordement aussi tragique marqua Olivet, inondation dont le souvenir fut longtemps conservé par une inscription dans l’église de Saint-Mesmin, sur laquelle on pouvait lire :
« L’an mil cinq cent soixante-sept
Du mois de mai le dix-sept
A cette place et endroit
S’assemblèrent Loyre et Loyret. »
Aux XVIIe et XVIIIe siècles, il y eut plusieurs crues de ce type. Celle de 1644 donna naissance à un
nouveau dicton :
« Quand Loyre et Loyret s’entretiennent
Il n’y a pays qu’ils ne tiennent. »
Les grandes inondations de 1846, 1856, 1866 furent encore plus dramatiques. De courageux mariniers-sauveteurs oeuvrèrent avec un courage admirable à sauver les habitants d’Olivet. Le nom de l’un d’eux n’a jamais été oublié : Alexandre-Joseph Caboche que l’on vit, lors de la crue d’octobre 1846, sillonner sans répit les eaux en furie entre Saint-Marceau et le pont d’Olivet pour arracher à la mort des dizaines de sinistrés. Par la suite, les débordements du Loiret furent beaucoup moins nombreux.
Un crue plus proche de nous a marqué les mémoires : le 2 octobre 1907, le Loiret est en crue et toutes les guinguettes et les moulins ont les pieds dans l’eau. En voici la description qu’en donne Louis d’Illiers, témoin oculaire de cette inondation : « La Loire avait alors atteint cinq mètres ! Le Loiret était très haut, le rez-de-chaussée des moulins était inondé ; dans la région des Béchets, on pouvait circuler en barque sur toutes les chaussées. Mais le courant de la Loire ne put avoir raison des levées. Les crues du Loiret étant postérieures d’un à deux jours à celles du fleuve, la rivière n’avait pas atteint le niveau de la Loire. Celle-ci reflua par l’embouchure et inonda tout le Val dans la région de Saint-Mesmin, mais l’inondation ne remonta pas en amont. Le courant était nul et tout rentra dans l’ordre sans trop de dommages au bout de deux jours. »