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La Bibliothèque d’Olivet
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Aux origines de la bibliothèque d’Olivet
Olivet s’est très tôt doté d’une bibliothèque communale, créée par décision du Conseil municipal en 1864. Abandonnée pendant la guerre de 1870, elle a été reconstituée en 1872 : en août le conseil municipal allouait un crédit pour l’achat de divers « livres et mémoires, et d‘une carte du département pour remplacer celle que les Allemands avaient volée ». La bibliothèque sera alors gérée par les instituteurs des écoles laïques sous l’égide de la Société d’instruction populaire fondée en 1872. Le bibliothécaire en était M. Michaut, extrêmement dévoué malgré son grand âge (il avait fêté son centenaire en 1896 et tout Olivet lui avait rendu hommage avec concert de l’Union musicale, banquet et bal au Salon Jeanne d’Arc !). Cette bibliothèque populaire a bien fonctionné jusqu’au début de la Grande Guerre, mais à partir de 1914 et la mobilisation, elle est mise en sommeil. On envisage sa reprise pour 1923.
La bibliothèque sous l’égide de la Maison des Jeunes et de la Culture
Créée le 22 Mars 1967 à l’initiative de jeunes Olivetains et avec le soutien de plusieurs associations de la commune, la Maison des Jeunes et de la Culture, ouverte à tous et proposant de multiples activités à la fois dans le domaine social, culturel, artistique, et sportif, s’est installée en 1970 dans des locaux préfabriqués dans le parc du Poutyl, baptisés Le Mille-Club. C’est dans ce cadre que des bénévoles de la MJC créent une bibliothèque qui va connaître un grand succès : vite à l’étroit dans Le Mille-Club, la bibliothèque est déménagée dans l’ancienne épicerie-fruiterie Seutin dans le centre-ville, rue Marcel Belot, où elle a été tenue jusqu’en 1987 par 25 bénévoles et a compté plus de 1200 lecteurs.
Au printemps 1987, la bibliothèque devenue municipale ouvre dans les locaux rénovés du Moulin de la Vapeur dédiés à la MJC, et connaît un essor remarquable, avec près de 4000 abonnés. Pour accompagner ce développement, la ville d’Olivet rachète, en 1992, l’Orphelinat Sainte-Marie et conçoit le projet d’y installer une bibliothèque moderne et plus spacieuse.
La « Famille Sainte-Marie »
Cette institution, appelée « Famille Sainte-Marie » remontait au début des années 1860 et était due à l’infatigable générosité du grand mécène Théophile Jourdan, qui avait financé l’achat d’un terrain à l’angle de la rue de la Mairie et de la rue du Pressoir-Tonneau, et l’édification d’un établissement devant servir d’orphelinat pour les petites filles. Commencés à l’automne 1861, les travaux, qui s’étaient poursuivis avec la construction de la chapelle dont la première pierre avait été posée le 7 juillet 1862, étaient achevés en 1863. Composé d’un vaste corps de logis surmonté d’un lanternon et orné d’une statue de la Vierge, avec deux ailes en retour encadrant la cour, ce bâtiment à l’architecture soignée allait héberger à partir de 1863 la « Famille Sainte-Marie », sous la houlette de quatre soeurs de Saint-Vincent de Paul, qui avaient à y gérer un orphelinat, un dispensaire et un ouvroir où les jeunes filles apprenaient les travaux d’aiguille. La chapelle, bénie le 6 juin 1864 par l’évêque d’Orléans Mgr Dupanloup, était éclairée de vitraux que le donateur avait lui-même dessinés (trois d’entre eux ont été conservés par la Mairie, représentant saint Théophile, du prénom du mécène, sainte Marguerite, du prénom de son épouse, et saint Charles, du prénom du frère de Théophile Jourdan).
En 1902, dans un contexte politique particulièrement anticlérical, les soeurs de Saint-Vincent-de Paul demandent au Conseil municipal l’autorisation de continuer à tenir leur établissement : par 10 voix contre 4 et 5 abstentions, la Municipalité d’Albert Barbier, pourtant totalement laïque et républicaine, vote le maintien de cette institution religieuse à laquelle les Olivetains étaient très attachés. Le conseil municipal avait mis en avant le rôle d’aide sociale qu’elles remplissaient, en tant que responsables d’un orphelinat et infirmières.
Hôpital pendant la guerre de 14-18, la « Famille Sainte-Marie » a aussi accueilli, dans les années 1930, des petits enfants parisiens envoyés là en colonie de vacances. En 1965, les militaires américains du camp de Maisonfort et les auxiliaires féminines d’Harbord Barracks (actuel quartier Valmy), tous très investis dans la vie olivetaine, se sont mobilisés pour restaurer la chapelle Sainte-Marie et apporter de l’aide aux religieuses et à leurs petites protégées. Laïcisée par la suite, « La Famille Sainte-Marie » devient en 1970, un centre de soins et un foyer pour des adolescentes en difficulté. Puis l’établissement cessera ses activités en 1992, date à laquelle la Mairie en fait l’acquisition.
Qui était Théophile Jourdan ?
Il avait démarré sa carrière dans le commerce et la fabrication des textiles à Lyon puis à Paris. Travailleur acharné et brillant ingénieur il avait fait fortune en créant, dans deux manufactures qu’il avait implantées dans le Nord (à Troisvilles et à Cambrai), de nouveaux types de tissus qui eurent un succès prodigieux : en 1827 il mettait sur le marché la « mousseline-laine » et en 1828 un tissu de laine et bourre de soie baptisé Chalys. Dans les années suivantes, il multiplia les innovations et s’ouvrit des débouchés dans toute l’Europe et les Etats-Unis. Mais à cause de problèmes de santé, il dut se retirer précocement des affaires et vendre ses usines. C’est alors qu’il a fait l’acquisition, en octobre 1846, de la propriété de « Petit-Bois », au bord du Loiret, et qu’il est venu s’y installer avec son épouse, faisant désormais bénéficier les Olivetains de son immense générosité. Sans enfant et profondément chrétien, il allait se dévouer sans compter pour sa nouvelle paroisse, aidant les plus démunis, multipliant les fondations et les constructions. C’est ainsi qu’il acheta tout le terrain entre l’église et le Loiret pour y construire un beau bâtiment avec salles de jeux et de réunions, et un ensemble de cours, jardins, terrasses, terrains de sports, destinés à la « Société de Saint-Joseph » : cette oeuvre qu’il avait créée le 8 juin 1860 offrait aux garçons de la paroisse de nombreuses
activités de patronage. Et quelques années plus tard, le 15 octobre 1867, il y fondait une école libre de garçons, sous la houlette des Frères des Ecoles Chrétiennes, pour laquelle il fit édifier un deuxième bâtiment identique.
Entre-temps, il avait fait un legs important qui permit de démarrer en 1861 la construction de « Sainte-Marie », cette institution pour les filles, qui allait traverser plus d’un siècle avant de devenir l’actuelle Bibliothèque d’Olivet. Et la liste des oeuvres de ce généreux mécène ne s’arrête pas là : il faudrait ajouter d’autres réalisations d’envergure, comme l’Association Sainte-Anne pour les jeunes filles, la Maison de Saint-Martin, première maison de retraite, et la Maison de Saint-Louis qui offrait des petits logements aux vieux ménages sans ressources… sans oublier la construction en 1864 de la chapelle sur ses terres de Petit-Bois (qu’il avait baptisée Notre-Dame du Loiret), de la chapelle de Noras, de nombreuses rénovations dans l’église Saint-Martin etc. Attentif à tout ce qui pouvait apporter, même modestement, un peu de mieux-être à ses concitoyens, il avait fait restaurer le lavoir public qui se trouvait tout près de sa propriété de Petit-Bois et y avait fait poser un toit d’ardoise pour que les femmes puissent faire les lessives à l’abri de la pluie.
Cette oeuvre exceptionnelle épuisa la fortune de Théophile Jourdan, qui, la mort dans l’âme, dut se résoudre en 1878 à vendre son domaine de Petit-Bois et à se retirer dans une maison qu’il possédait à la Seyne-sur-Mer près de Toulon, où il s’éteignit le 30 août 1883. Son corps, comme il l’avait souhaité, fut ramené et inhumé dans le cimetière d’Olivet : une foule immense accompagna ce grand bienfaiteur de la commune jusqu’à sa dernière demeure.
Une belle réhabilitation
En 1992, la ville achète donc l’ensemble du bâti de l’Institution Sainte-Marie. Mme Monique Faller, maire de l'époque (elle a occupé ce poste de 1983 à 2001), lance le projet d'y installer la bibliothèque en conservant la chapelle pour en faire un lieu d'exposition. Le projet est repris par son successeur M. Hugues Saury qui retravaille les plans, définit l'esthétique de l'ensemble. Et le chantier démarre en 2002, pour durer dix-huit mois : la nouvelle bibliothèque a été inaugurée le 26 juin 2004.
Les travaux de rénovation de la chapelle se sont poursuivis avec la réalisation in situ de nouveaux vitraux par l’artiste Pierre Zanzucchi. À la fois modernes et intemporels, les douze vitraux créés par l’artiste, allégés de leur sertissage traditionnel en plomb, déclinant d’infinies nuances de bleu, de vert et de jaune au gré des variations de la lumière, mettent en valeur cet espace aux lignes néo-gothiques pures et élégantes, reliant avec poésie le passé à l’avenir. Inauguré en décembre 2005, sous le nom d’Espace Aignan-Thomas Desfriches, ce lieu si délicatement investi par la lumière, à la fois intime, précieux et ouvert à tous, accueille les activités culturelles organisées par la bibliothèque : expositions, petits concerts, lectures et rencontres avec des écrivains…
Ainsi la bibliothèque d’Olivet, si riche d’héritages et d’histoires, poursuivant sa vocation originelle d’éducation et de diffusion des trésors du savoir, disposant aujourd’hui d’un fonds de 60 000 ouvrages, est-elle un espace vivant et dynamique dans l’écrin moderne de ses vieilles pierres préservées, plus que jamais lieu de culture, de formation, de découvertes et d’échanges, porte ouverte sur le monde fascinant de la lecture en même temps que sur l’art sous toutes ses formes.