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Sur le pont d'Olivet
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Du gué de Saint-Martin-du-Loiret…
Olivet est, depuis l’aube de son histoire, un point de franchissement du Loiret : il y avait là un gué entre plusieurs ilôts qui permettait à la vieille route gallo-romaine de Bourges de traverser la rivière. Sans doute ce gué avait-il été aménagé de passerelles en bois pour le rendre plus praticable. Profitant de cette voie de circulation, un hameau s’était blotti en bordure du coteau, au débouché du gué, puis un bourg s’y était développé, portant alors le nom de Saint-Martin-du-Loiret (attesté dès le 10e siècle), du fait de sa position tout au bord de la rivière. Ce village allait prendre de l’importance avec la culture de la vigne et l’exploitation des moulins, sous l’impulsion des nombreuses communautés religieuses qui y possédaient des terres. C’est d’ailleurs à l’une de ces communautés religieuses que le petit village a dû son nouveau nom d’ Olivet .
En effet en 1152, le roi Louis VII avait offert à des religieux de l’abbaye de Notre-Dame du Mont-Sion de Jérusalem, revenus avec lui de Terre Sainte après la deuxième croisade, le prieuré de Saint-Samson d’Orléans. À cette donation, le roi avait joint celle d’un moulin et de terres dans la paroisse de Saint-Martin-du-Loiret : les chanoines de Saint-Samson prirent dès lors l’habitude de désigner leurs propriétés du bord du Loiret sous le nom d’Olivet, en souvenir du Mont des Oliviers près de Jérusalem, haut lieu de l’Histoire sainte. Et peu à peu le nom d’Olivet, qui apparaît dans les textes dès les premières années du 13e siècle puis devient usuel à partir du 16e siècle, allait définitivement remplacer celui de Saint-Martin-du Loiret. Et voilà comment le nom d’Olivet conserve, sous le ciel ligérien, le souvenir lointain des oliviers de la Terre Sainte. Son nom est déjà toute une invitation au voyage, entre l’histoire et la légende.
… Au pont d’Olivet
Le pont médiéval
Au début du 13 e siècle, le petit bourg a pris son envol : les travaux de la vigne et du vin dans les innombrables clos, l’activité incessante des moulins, les charrois transportant le grain, les sacs de farine, les tonneaux de vins du cru et les corbeilles de poissons du Loiret, les allées et venues des religieuses et des religieux entre leurs maisons-mères et leurs propriétés des bords du Loiret, sans oublier les ânes des maraîchers chargés de légumes pour se rendre au marché d’Orléans … Tout cela rendait nécessaire la construction d’un pont pour relier le village à la rive nord du Loiret et faciliter les communications avec la grande ville.
Dans les toutes premières années du 13 e siècle était donc établi un beau pont de pierre ogival de 12 arches en arc brisé. S’y appuyaient, du côté de la rive droite, le moulin des moines de Micy et un petit hospice, appelé Hôtel-Dieu de Saint-Martin, pour accueillir les voyageurs et les pèlerins, qui pouvaient y séjourner trois jours.
En décembre 1505, Louis XII confiait aux échevins d’Orléans l’administration du petit « hospice du pont de Saint-Martin-du-Loiret », à charge à eux de réparer et le pont et l’hospice. Les échevins s’empressèrent de mettre une chaîne à l’entrée du pont et d’établir un péage conséquent pour rentrer dans leurs frais de réparation ! François Ier leur confirma ce droit ainsi que celui de « gouverner le pont et les chaussées d’Olivet ».
À l’entrée du pont côté bourg, une cale en pente douce descendait vers la rivière : c’était, depuis l’origine, l’abreuvoir du bourg où l’on menait boire les chevaux et le bétail. Ce vieux pont, au cours des siècles, a connu bien des misères : malmené par les grandes inondations, il a été réparé à maintes reprises. On trouve traces des plus anciennes restaurations en 1389-92, 1410-14, 1602-05, 1681. En janvier 1801, il a causé de sérieuses inquiétudes : un éboulement s’était produit à la culée nord et rendait très périlleux le passage des diligences, accident d’autant plus préoccupant que c’était la grande route Paris-Toulouse (qui deviendra plus tard la Nationale 20), axe de circulation important et fréquenté, qui empruntait le pont d’Olivet.
En 1814, à la fin de l’épopée napoléonienne, l’armée de la Loire, en se retirant devant les armées ennemies, avait fait sauter une des arches de la rive droite. En 1846, la première des terribles crues décennales avait emporté deux arches. Le pont, sans cesse rafistolé, devenait vraiment dangereux !
Le moulin du vieux pont d’Olivet
Sans doute construit au début du 13 e siècle en même temps que le pont auquel il était accolé, un moulin se trouvait entre la 9 e et la 10 e arche (en venant d’Olivet). Il appartenait au monastère de Micy, qui contrôlait alors presque tout le cours du Loiret .
Après les guerres de Religion qui avaient dévasté leur monastère, les moines de Micy, pour faire face aux dépenses de reconstruction, sont obligés de vendre une partie de leurs biens, dont le moulin du pont d’Olivet qu’ils cèdent en janvier 1607 au maréchal Fougeu d’Escures, propriétaire du Poutyl. À la fin du 18e siècle le moulin connaît une double activité : Etienne-François Jacque de Mainville qui a établi sa manufacture de toiles peintes sur son domaine du Couasnon (à la tête nord du pont) fait installer une deuxième roue pour actionner les cylindres destinés à calandrer (c’est-à-dire lisser et imprimer) ses toiles. Cette double activité a duré jusqu’à la fermeture de la manufacture Jacque de Mainville en 1820. Le moulin poursuit alors sa carrière de moulin à blé.
Devenu vétuste, il est entièrement reconstruit en 1831 par la famille d’Escures qui en était toujours propriétaire. Ce bâtiment, à la forme parallélépipédique très reconnaissable sur les anciennes gravures, a été finalement racheté en 1870 par les Ponts et Chaussées pour être démoli avec le vieux pont.
Un premier bateau-lavoir
Au début des années 1840, le sieur Henry Horst est autorisé à établir un bateau-lavoir en contrebas du pont rive gauche. En 1846 il complète son installation en aménageant, sur le côté, un petit établissement de bains de 5 m de long sur 2m70 de large qui demeura en service pendant 20 ans : emporté par l’inondation de 1866, ce premier établissement de bains olivétain ne fut pas reconstruit. Le lavoir communal se trouvait, quant à lui, en amont, sous la chapelle du Petit-Bois. Théophile Jourdan, qui s’était rendu acquéreur de la propriété du Petit-Bois en 1846, avait fait poser à ses frais une toiture sur le lavoir et l’avait aménagé pour que les lavandières y puissent travailler dans de meilleures conditions. Il a servi jusqu’au début des années 1950, et a, depuis, disparu.
Le nouveau pont
En avril 1869 les travaux sont mis en adjudication. Le 16 juin 1870 le ministre des Travaux accorde au département du Loiret un crédit de 50 000 francs pour la reconstruction d’un nouveau pont en remplacement de l’ancien qui avait vécu presque 7 siècles.
Le 10 juillet 1870, au cours d’une belle fête a lieu la pose de la première pierre du nouveau pont, en présence du préfet et de toutes les autorités. On encastre à la base de la première pile une boîte de plomb contenant des pièces de monnaie à l’effigie de Napoléon III. Le soir il y a une fête vénitienne sur le Loiret, couvert d’embarcations décorées et illuminées. Mais peu après, la guerre éclate. Les travaux seront suspendus et repris après les hostilités, sur des plans de l’ingénieur Henry Sainjon et sous la direction de M. Regnier conducteur principal des Ponts et Chaussées. Le chantier est rapidement mené, terminé en mars 1872 et le pont est ouvert à la circulation le 23 mars.
Il a belle allure avec ses 22 arches et ses parapets en fonte ajourés, fabriqués par la fonderie Lefèvre d’Orléans. Il a été construit en pierres locales : le calcaire de Saint-Fiacre, provenant des carrières toutes proches de Mareau-aux-Prés (ces carrières dites de la Plaine Saint-Fiacre et de la Grande-Maison étaient exploitées en galeries souterraines).
Le bateau-lavoir qui existait auparavant a retrouvé son emplacement après la construction du nouveau pont et a subsisté jusqu’en 1910. Formant un décor très pittoresque avec la tonnelle et l’embarcadère de la ginguette l’Eldorado, il figure sur plusieurs cartes postales 1900.
Le 9 juillet 1944, lors de combats de la Libération, d’importants bombardements détruisent deux arches du pont qui s’effondrent dans le Loiret, rendant tout passage impossible. Les arches détruites sont reconstruites à l’identique. Le pont est baptisé Maréchal Leclerc après le décès de ce dernier pour rendre hommage à celui qui fut le libérateur de Paris et de Strasbourg. Et, depuis, notre pont traverse des jours
heureux, croulant sous les fleurs dès le début de la belle saison.
La passerelle pour piétons
En 2011 a été aménagée une passerelle en encorbellement, longeant le pont Maréchal Leclerc côté aval, pour permettre aux piétons, aux cyclistes et aux personnes à mobilité réduite de franchir le Loiret en toute sécurité. Conçue pour s’intégrer harmonieusement dans son environnement, la structure métallique s’adosse aux pierres du vieux pont grâce à onze arcs très élégants appuyés sur les arrière-becs en
maçonnerie.
Le tramway : un feuilleton à épisodes
Il y eut d’abord, pour desservir Olivet un service d’omnibus à cheval (de la place du Martroi au pont sur le Loiret), pris d’assaut dès le début de la belle saison par les Orléanais qui venaient au bord du Loiret goûter les plaisirs de la campagne les samedi et dimanche. Pour faciliter les allées et venues des Orléanais en goguette, on envisage en 1868 la création d’un « chemin de fer américain » (voiture roulant sur des rails mais à traction hippomobile), entre l’entrée du pont d’Orléans et celui d’Olivet.
Ce premier projet de transport en communs entre Orléans et Olivet avait rencontré un grand succès : dès la fin 1868, le Comptoir d’Escompte d’Orléans avait mis en vente des actions, et les souscriptions avait afflué, à la Mairie d’Olivet et à la Banque de la place du Martroi. Mais la guerre de 1870 avait mis un coup d’arrêt à ce projet, qui réapparaît tout début 1872 sous une forme plus ambitieuse : l’entreprise Waring Frères propose d’installer un « chemin de fer américain » ou tramway à traction animale entre le nord d’Orléans et Olivet. Une enquête administrative est ouverte, qui soulève de nombreuses protestations si bien que le conseil municipal d’Olivet refuse la proposition.
Olivet va devoir attendre plusieurs années avant d’être desservi par le tramway, et le trajet continue à se faire en omnibus, jusqu’à ce que, le 1 er mai 1884, le tramway, sur rail mais à traction animale, arrive à la tête nord du pont. En juin 1899, il est à traction électrique . En septembre 1903, la ligne est enfin prolongée : le tramway franchit le pont et monte dans le bourg, où le terminus de la ligne Bel-Air-Olivet se situe place de la République, à l’embranchement de la route d’Ardon (actuellement intersection de la rue Marcel Belot et la rue Paulin Labarre).
À la belle saison, pour faire face à l’affluence en fin de semaine, on attachait en remorque au tram une « baladeuse », avec des bancs à l’air libre. Mais si l’on rentrait un peu tard, après avoir dansé toute la soirée, il n’y avait plus de tram et il fallait faire le trajet du retour à pied. Malheureusement le service de tramways Orléans-Olivet s’est vite révélé peu rentable : l’affluence était considérable les samedis et dimanches, mais le reste de la semaine la ligne était déficitaire et la Compagnie des tramways demandait à la commune d’Olivet des subventions croissantes pour payer le déficit. La desserte du bourg est alors devenue irrégulière, jusqu’à son arrêt définitif en 1938.
Une fois arrivés à Olivet, les amateurs de terrasses au bord de l’eau, de petite friture, de bal musette, de pêche, canotage et autres plaisirs champêtres, avaient l’embarras du choix : une foule de charmantes guinguettes les attendait…
La Belle Epoque des guinguettes
À partir des années 1840, un service d’omnibus avait permis aux Orléanais de découvrir, à peu de frais, les charmes de la campagne au bord du Loiret. Olivet allait devenir, à la belle saison, le but favori de balades des citadins, toutes classes confondues. En 1868, un article du Journal du Loiret se faisait l’écho de cet engouement : « Olivet ! Quelle source de plaisirs pour les Orléanais ! Chaque année, dès la réouverture du printemps et les premiers débuts du joli mois de mai, alors que les ormes de la rue Dauphine se parent coquettement de leurs premières feuilles, les voitures sont bourrées de monde. Il y a des voyageurs dans la caisse et dans la soupente, sur l’impériale et sur le siècle du cocher, sur le marche-pied et sur les brancards ! Les bords du Loiret ont un vif attrait pour toutes classes de la population qui accomplissent tous les dimanches ce doux pèlerinage du plaisir… »
On s’y régalait de croustillante friture et matelote à toute heure, ou de fricassée de poulet à la crème, le tout arrosé de vin blanc d’Olivet ou de vin rouge de Beaugency ou de Saint-Ay. On y louait des canots, des
périssoires et des yoles ; dans certaines on pouvait danser.
Le premier à lancer la vogue des guinguettes a été, en 1848, Paul Forêt qui crée en amont du pont, sur le bassin supérieur du Loiret, un restaurant à l’enseigne À la bonne Matelotte (avec deux t !). Le succès est immédiatement au rendez-vous : il disposait d’un embarcadère privé au pied du pont d’Olivet (près de l’arrêt de tramway) et louait des bateaux qui menaient les promeneurs au restaurant ou pour une promenade jusqu’à la Source ; un garçon du restaurant embarquait obligatoirement sur chaque canot et assurait la bonne tenue et la sécurité des promeneurs. On s’y précipitait pour déguster la matelote arrosée du petit vin du cru, et l’établissement était tellement couru qu’il y avait des embouteillages de bateaux sur son ponton d’embarquement ! Et le journal Paris Magazine du 1 e janvier 1873 comparait élogieusement le
restaurant Paul Forêt aux meilleures guinguettes de la Marne : « Le Loiret, une rivière microscopique mais charmante, qui n’a guère que trois lieues de cours, et qui prend sa source à Olivet pour aller se jeter dans la Loire. On le voit sortir de terre au milieu du parc du château de la Source, et c’est vraiment chose à visiter. Ses bords sont peuplés de jolis châteaux qui rappellent complètement le lac d’Enghien.
En été toute une population de canotiers s’y agite comme à Bougival, et les matelotes de Paul Forêt
sont aussi célèbres que celles de Joinville-le-Pont. ».
Un peu plus tard, vers 1855, s’ouvrait un second restaurant, au bas du pont d’Olivet, côté sud, juste avant la montée vers le bourg, baptisé l’Eldorado, qui se remarquait par son élégante tonnelle couverte de chaume au bord de l’eau, son ponton et son jardin. Il louait aussi des bateaux et devint très vite réputé pour sa grande salle de bal, très fréquentée, et ses « Bals de jour et de nuit ». Au point d’ailleurs que les familiers appelaient l’Eldorado « les pieds qui remuent » ! Voici un aperçu de ce sympathique établissement en 1868 : « Le restaurant-closerie L’Eldorado, où la jeunesse orléanaise se donne rendez-vous chaque dimanche, pour canoter pendant le jour et développer le soir ses aptitudes chorégraphiques. Souvent s’y transportent, en voitures de gala, des noces artisanes dont l’élément jeune se distribue autour des jeux de tonneaux et des escarpolettes, tandis que les anciens se rangent sous la ramée pour fêter les vins du cru. » ( Le Loiret et ses rives, Olivet , Deslignières, 1868)
Avec le succès grandissant de ces beaux dimanches à la campagne, autour de 1900 de nombreuses
guinguettes se créèrent sur les deux rives, jusqu’à en compter une dizaine :
Situé juste en face de la station de tramways, avant le pont d’Olivet, le Restaurant du Prado appartenant à une très vieille famille olivétaine, les Fortépaule, accueillait les promeneurs du dimanche à leur descente du tram et offrait une table renommée, une salle de banquet de 150 couverts et un grand jardin. L’aspect des lieux, certes modernisés, n’a guère changé et la tradition gastronomique y perdure : c’est aujourd’hui le restaurant La Laurendière.
Et tout à côté, on dansait À Trianon , connu aussi vers 1900 sous le nom de Bal des Pépinières ou Moulin Rose. A sa suite s’est installé un dancing, cher à la mémoire des Orléanais et des Olivétains, qui s’appelait le Zig ou plutôt le Zig-Zag, ensuite devenu le Pavillon.
Aux Canotiers, à l’entrée nord du pont du Loiret (existe toujours) : le Comité d’Initiative et des Fêtes d’Olivet, créé en 1926, avec comme président Louis d’Illiers et comme vice-président Fernand Forêt le fils du fameux Paul Forêt, y installe son siège. Tout proche Le Petit Rambouillet : « On y casse la croûte, on y boit du bon vin ».
Puis en longeant la rivière rive droite on rencontrait À Madagascar, grand restaurant de la famille Couillard (cet établissement existe toujours sous la même enseigne). Le Pavillon Bleu, appartenant à la famille Grenier, et son magnifique ponton, ses tonnelles en dentelle de bois (qui existe toujours sous la même enseigne). Le Robinson, qui a été agrandi et complètement modernisé après la Deuxième Guerre mondiale et rebaptisé Le Rivage , nom qu’il a conservé aujourd’hui. La Closerie des Lilas qui, remis au goût du jour sous le nom de Manderley, a définitivement fermé ses portes.
Entre la fin du 19e et le début du 20e siècle, les guinguettes étaient devenues une véritable institution, célèbre bien au-delà de l’Orléanais, comme l’écrivait avec enthousiasme en 1920 le fameux gastronome Curnonsky dans son petit guide L’Orléanais gastronomique : « Olivet et les sources du Loiret sont pour les Orléanais ce que sont les Ponts-de-Cé pour les Angevins, l’Ile-Barbe pour les Lyonnais, Bougival pour les Parisiens, c’est-à-dire la folie, la vadrouille et la rigolade, la pêche et le canotage, la guinguette et la tonnelle, la sieste sous l’ombrage, les hasards heureux de l’escarpolette, la bonne franquette et le rond de saucisson. Les guinguettes d’Olivet ont d’ailleurs acquis une telle célébrité que les Parisiens même y viennent le dimanche. On trouve dans toutes la même réception cordiale et bon enfant, la même cuisine simple et saine, les mêmes vins du cru allègres et pétillants. »
La circulation des bateaux : Tous ces sympathiques établissements les pieds dans l’eau louaient des barques et des canots. Le choix des embarcations était très large : barque familiale, skiff, périssoire, yole (avec sièges à glissière). Ils disposaient tous également d’un canot automobile, comme on disait, pour aller chercher les clients au bas du pont d’Olivet, ou les emmener en promenade. Ces embarcations étaient coiffées d’un auvent de bois du plus joli effet, et offraient confort et sécurité (banquettes, rame de secours, klaxon, bouées sur le toit… Pas un seul accident connu !)
La Closerie des Lilas s’était équipée en 1918 d’une curiosité, un canot hydroglisseur (c’était l’ancêtre de nos modernes hydroglisseurs et overcrafts). Les canots automobiles du Madagascar et du Pavillon Bleu, qui s’appelaient le Quo Vadis et le Jean-Bart, ont navigué jusqu’en 1960.
L’hôtel-restaurant le Beauvoir construit en 1955 au bord du Loiret, rive gauche près du pont Leclerc (il eut le tout premier mini-golf de la région) s’attacha les services d’un beau bateau pour promener ses clients sur le Loiret, baptisé le Jeanne d’Arc. Le dernier en date de ces bateaux de promenade sur le Loiret, Le Sologne, mis à l’eau en août 1987, pouvait accueillir jusqu’à 99 personnes avec repas servis à bord. C’était le restaurant À Madagascar qui était à l’origine de cette mise en service, voulant redonner vie à la rivière et rappeler la belle époque des guinguettes.
Les fêtes sur le Loiret
Avec le début de la mode des guinguettes allaient avoir lieu à la belle saison quantité de spectacles nautiques et corsos de bateaux fleuris.
L’initiative en revient à Paul Forêt qui, dès son installation, organise et sponsorise, sur le bassin devant son restaurant (qu’on appela dès lors le bassin Paul Forêt), des régates et des fêtes nautiques. Les fêtes de nuit allaient en particulier connaître un très grand succès, ininterrompu à partir des années 1840.
Voici le récit de l’une de ces fêtes dans Le Loiret et ses rives - Olivet , Deslignières 1868 :
« La nuit venue, sous un ciel bleu parsemé d’étoiles, on entend des bruissements de feuillages, des clapotements dans l’eau, des cris de ralliement… et voilà bientôt la fête qui éclate partout à la fois ! Des guirlandes de feu courent sur les deux rives avec de gracieuses ondulations, comme des serpents lumineux ! Châteaux, maisons, chalets, dont les façades flamboient par toutes leurs ouvertures se couvrent d’oriflammes, de bannières qui s’agitent autour des lanternes vénitiennes versicolores ! (…) Des barques, des canots de plaisance, des gigs, des balancelles, des flûtes, des pirogues, des yoles, des podoscaphes, des gondoles et des bateaux de gros calibre, tous illuminés, drapés, chargés de feuillages et de fleurs, bariolés comme des danseuses espagnoles, sortent de toutes parts et s’entrecroisent sur tous les points. Tout cela s’agite, fourmille, se débat sur les vagues guillochées, rayonnant d’allégresse et étincelant de lumière. (…) C’est Venise et c’est le Grand Canal (…)
À cette indescriptible fantasmagorie, qui semble animer un fouillis prodigieux de perles et de saphirs, vient s’ajouter encore une fête pyrotechnique, car déjà des fusées volantes à aigrettes et à parachutes, qui sifflent comme des serpents, montent, en avant-coureuses vers la voûte éthérée. (…) Des rosaces, des mosaïques, des gloires, des volcans, des soleils à plusieurs révolutions, des cercles, des triangles, des ellipses, des octaèdres, ruisselants et rayonnants, embrasent l’atmosphère et portent en haut toute cette pluie d’or que nous admirions en bas.
Puis viennent des pièces à grands effets : des monuments, des basiliques, des cataractes diamantées, des bombes de couleurs pourpre, azur ou émeraude qui détonnent avec un fracas d’artillerie.
La fête s’achève enfin (…) et dix mille voix dans un cri confondues font éclater un hourra formidable. »
C’était chaque année un évènement très attendu et préparé par tous les Olivetains, avec concert sur l’eau, illuminations sur les bords du Loiret, flottilles de barques décorées illuminées de lampions multicolores, feux de Bengale et feux d’artifice ; la fête se terminait tard dans la nuit avec de nombreux bals.
Le Comité des Fêtes d’Olivet organisait également des fêtes fleuries (de jour) sur le Loiret, ainsi que des régates, des joutes nautiques. Après la Grande Guerre, ces fêtes se sont multipliées et ont pris une grande ampleur, nécessitant la création d’un nouveau « Comité d’Initiative et des Fêtes d’Olivet » en février 1926.