Parcours patrimoine
Le moulin de la Mothe-Saint-Avit
Site information
Le mystère des eaux des sources de Saint-Avit
Les fontaines de Saint-Avit, autrefois très abondantes, faisaient tout le charme de ces lieux : « La charmante retraite de la Mothe-Bouquin, où l’on voit plusieurs fontaines joindre leurs eaux pures et transparentes, en former un ruisseau assez rapide qui baigne le coteau, et les porter en murmurant, sur un parcours de quelques toises, en tribut au Loiret. » écrivait Beauvais de Préau en 1785 dans sa Description topographique d’Olivet.
Ces petites sources participaient à l’alimentation en eau du Loiret, rivière au fonctionnement hydrologique très atypique, tributaire de nombreuses résurgences de la Loire, mais aussi de sources issues du coteau de Sologne, ainsi que le précisait Beauvais de Préau au XVIIIe siècle : « Les fontaines les plus remarquables qui grossissent le Loiret sont celles du Poutil et de la Mothe-Bouquin ; la Fontaine de Saint-Julien qui a donné son nom à une superbe maison située dans son voisinage ; et les trois fontaines de Caubray dont l’une fait tourner un moulin. »
Des sources convoitées
Ces sources appartenaient depuis 1465 aux religieuses de la Madeleine, également propriétaires du moulin de la Mothe. Elles firent un procès au XVIIe siècle à Claude Bouquin, seigneur du château de la Mothe, qui prétendait s’approprier les sources et les utiliser pour son jardin et sa demeure. C’est seulement après la Révolution que le propriétaire du château, Jacques Didier, put utiliser à son profit les fontaines de Saint-Avit : il y fit installer, sous une maisonnette à colombages, un peu en aval du moulin de la Mothe, une pompe destinée à en remonter les eaux jusqu’à son château.
Évidemment cette initiative provoqua une vague de mécontentements, les propriétaires voisins arguant que cette installation gênait le débit du Loiret et par là la bonne marche des moulins situés en aval. Il y eut procès en 1829… Mais Jacques Didier obtint gain de cause et put se servir des sources pour alimenter en eau sa demeure.
Par la suite, la petite turbine, qui ne servait plus à monter l’eau au château de la Mothe, était restée en l’état. Dans son étude manuscrite sur les moulins du Loiret, en 1938, Louis d’Illiers décrit l’état des sources à cette époque : « Derrière le moulin de la Mothe, au bas du coteau, on trouve une très intéressante construction probablement médiévale. Une série d’arcatures renforce un mur bâti légèrement en courbe et qui soutient les terres du coteau. Les arcatures, cachées par des lierres, n’apparaissent qu’à un oeil exercé. Au pied de ces arcatures jaillissent des sources sous-fluviales dont l’onde pure bouillonne à fleur d’eau avant de se mêler aux eaux vertes du Loiret. L’ensemble se nomme les Fontaines de Saint-Avit. Quelques mètres plus loin, en aval, une petite maison contient une roue qui tourne gratuitement. C’est la turbine de la Mothe. »
La ville d’Olivet, propriétaire depuis 1970 de l’ensemble du domaine de la Mothe, fit restaurer le mini-moulin, à l’occasion de l’ouverture, en 1979, des deux premiers « Sentiers au bord de l’eau » qui partaient du pied du château de la Mothe.
Qui était le bon saint Avit ?
Né dans une famille de pauvres paysans, Avit entra tout jeune à l'abbaye de Micy, qui venait d’être fondée au bord du Loiret. Le saint abbé Mesmin ou Maximin sut discerner son mérite dans sa charité pour les pauvres, et lui donna la charge d'économe du couvent.
Mais bientôt l'amour de la solitude l'emporta : ayant déposé, de nuit, ses clefs dans le lit de l'abbé endormi, il se réfugia au fond de la forêt pour vivre en ermite, complètement détaché du monde. À la mort de l'abbé Maximin, les religieux de Micy allèrent le chercher pour en faire leur abbé, et l’arrachèrent à sa sainte retraite. Par la suite il était parti évangéliser le Perche et Châteaudun, où une importante abbaye devait lui être dédiée.
À sa mort, au début du VIe siècle, il fut inhumé à Orléans dans une petite église qui allait prendre le nom de Saint-Avit et que le roi Gontran transforma en basilique en 532. De ce très ancien sanctuaire il reste aujourd’hui la crypte, redécouverte en 1852, encore visible dans les locaux du collège Jeanne d’Arc rue Dupanloup.
Le nom de ce saint, à la fois abbé de Micy et ermite de la Forêt d’Orléans, populaire dans nos campagnes à partir du VIe siècle, avait été donné à ces sources au bord du Loiret, considérées comme sacrées dès l’époque gallo-romaine.
Des eaux bonnes à boire ?
Dans ses Observations sur la rivière du Loiret, l’ingénieur des Mines Héricart notait en 1799 : « Les fontaines du jardin de la Mothe-Bouquin sont en grand nombre et très abondantes en sortant du coteau de Sologne, forment un canal très rapide dont les eaux, après un cours de 45 à 50 mètres, vont se jeter dans le Loiret. » « Les eaux de ces fontaines – ajoute le savant ingénieur – sont très bonnes pour la boisson, la cuisson des légumes et pour fondre le savon. » Les habitants, pendant des siècles, sont venus en effet s’approvisionner en eau potable à ces sources très pures, filtrées par les sables du coteau de Sologne.
Il est vrai qu’autrefois les vieux historiens ne tarissaient pas d’éloges sur la saveur et la bonté des eaux du Loiret. Par exemple, l’historien orléanais Lemaire écrivait avec enthousiasme au XVIIe siècle : « L’eau du Loiret est claire, nette, argentine, n’ayant aucune qualité nuisible et passant soudainement par sa légèreté, lorsqu’elle est bue, de l’estomac jusqu’en bas. Les vignerons fébricitants en usent et s’en trouvent soulagés et guéris… Mais le goût délectable du vin d’Olivet, qui croît aux environs, fait mépriser aux habitants les eaux pures et cristallines de cette source, qui a été tant admirée et recherchée des étrangers, que le duc de Pasterane, ambassadeur du Roy d’Espagne, passant par Orléans en aoust 1612, se transporta sur ladite source du Loiret qu’il admira, et ayant gousté de ses eaux si douces et délectables, il prenait la peine d’envoyer par chacune semaine, par neuf mois durant, de la ville de Paris, deux relais pour lui porter de cette eau dans des barils, dont il usait à ses repas. La pinte de cette eau transportée audit Paris par mulets revenait à 15 sols. » Histoires et Antiquités de la ville d’Orléans, 1648