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Petite leçon de botanique
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La flore des bords du Loiret
Conservatoire d’une nature amoureusement préservée, les rives du Loiret abritent bien des trésors… « Il suffit de considérer le phénomène géographique des sources du Loiret, le mystérieux entrelacs de rivières qui en découle, les arbres prodigieux qui poussent sur les rives de ces eaux calmes, les cygnes antiques qui y vivent en colonie, les dédales aquatiques où se perd le fil de l’eau avant de retrouver la Loire, pour comprendre que ces lieux furent de tout temps sacrés et que c’est bien ici le coeur des Gaules. » - écrivait Gaston Bonheur dans Notre patrie gauloise. Les cygnes antiques, les arbres prodigieux, le lacis de petits bras, les eaux lentes et paisibles… Le décor n’a presque pas changé et enchante toujours les promeneurs.
Les cygnes du Loiret
Acclimatés dans les parcs de châteaux comme précieux oiseaux d’agrément dès le XVIe siècle, depuis les pays nordiques où ils jouissaient d’une grande popularité, les premiers cygnes ont été introduits à Olivet au début du XVIIe siècle par Fougeu d’Escures, propriétaire du Poutyl. Ces nombreux oiseaux entretenus par le seigneur du Poutyl étaient fort mal vus des moines de Micy, qui détenaient encore des droits de pêche dans cette portion du Loiret, et disaient que les cygnes détruisaient le « menu poisson ». Il y eut procès en 1626 : cité par les moines en justice à Orléans, d’Escures fut condamné à « supprimer ses cygnes soit en les tuant, soit en les vendant » !
Néanmoins les cygnes étaient restés nombreux sur le Loiret : Symphorien Guyon dans son Histoire de l'église et diocèse, ville et université d'Orléans en 1647 écrivait « On voit sur cette petite rivière quantité de beaux cygnes qui font un spectacle fort agréable aux passants, et de notre temps on en a vu quelques fois plus de deux cents. » Et François Salerne, savant médecin orléanais, notait, dans son Traité d’Ornithologie en 1767 que « les cygnes sauvages, lors des forts hivers, viennent sur le Loiret. »
Au XXe siècle, les cygnes avaient quasiment disparu du Loiret. Pour y réinstaller une population significative, le Syndicat d’Initiative d’Olivet a lâché en 1959 trois cygnes tuberculés, reconnaissables au renflement noir qu’ils portent sur le front au-dessus du bec. Ils s’y sont trouvés bien, mais la pollution de la rivière dans les années 1970 a un temps menacé leur petite colonie.
Signe de la qualité retrouvée de ses eaux, les cygnes sont aujourd’hui de plus en plus nombreux sur le Loiret, où ils se reproduisent désormais, chaque printemps. Au cours de cette période de reproduction, les cygnes marquent leur territoire et peuvent adopter une attitude menaçante face aux promeneurs trop curieux. Il est impératif de ne pas les déranger.
Admirez-les, mais surtout, gardez-vous bien de donner du pain aux cygnes et aux canards : cela met leur vie en danger. Ils se nourrissent surtout de végétaux subaquatiques qu’ils vont chercher en plongeant la tête sous l’eau, et de plantes poussant sur les berges. Ils ne dédaignent pas les insectes et petits crustacés présents dans les rivières. Le pain leur est terriblement néfaste.
Les cyprès chauves, des arbres prodigieux
Les promeneurs du bord du Loiret connaissent bien cet arbre pas banal qui pousse les pieds dans l’eau, près du parking des Béchets. Ses courtes aiguilles l’auréolent d’un houppier plumeux qui donne une ombre légère et fraîche où il fait bon paresser et rêver lors des longues promenades estivales au bord de l’eau. Et à l’automne il s’habille de vieil or et de rouge sombre (une splendeur !), avant de devenir complètement chauve pour l’hiver. De là son nom vernaculaire de Cyprès chauve.
Son nom savant est Taxodier (Taxodium distichum en latin), c’est un cousin d’Amérique du Nord du Métaséquoia de Chine. Il appartient bien à la grande famille des conifères, mais il offre la particularité de se mettre tout nu pour l’hiver, ce que ne font pas, dans l’ensemble, ses cousins conifères, qui, prudents, restent bien couverts de leurs aiguilles pendant les frimas. Enfin, son autre nom le plus courant est Cyprès de Louisiane, parce qu’il est originaire de cette région où il pousse à l’état spontané dans les zones humides.
Des graines de ce bel arbre avaient été rapportées en Angleterre au XVIIe siècle par le botaniste John Tradescant, jardinier du roi Charles Ier. Mais il est resté inconnu en France, jusqu’au milieu du 18 e siècle, et c’est dans le Loiret qu’il va être cultivé et acclimaté pour la première fois !
En effet, en 1745, notre grand savant loirétain, Henri-Louis Duhamel du Monceau, reçoit directement de Louisiane des graines qu’il s’empresse de planter dans son domaine du Monceau en Pithiverais, où il s’aperçoit que c’est presque les pieds dans l’eau que ces jeunes plants poussent le mieux. Rapidement, il possède une belle pépinière de ces Cyprès de Louisiane et en donnent des pieds à ses amis passionnés de végétaux, comme l’atteste sa correspondance.
Ce sont les jardins paysagers du XIXe siècle qui le rendent populaire : il est planté près des pièces d’eau dans les parcs des châteaux, où il est particulièrement décoratif avec ces étranges protubérances ligneuses qui sortent de terre à son pied, et dont le nom savant est « pneumatophores » : ce sont ses racines sortant du sol, qui font de véritables fascines comme des tuyaux d’orgue tronqués. En Louisiane on appelle ces grosses racines aériennes des « Boscoyos de Cipre ». Les Cajuns des bayous croyaient autrefois que ces boscoyos permettaient à l’arbre de se reproduire.
Et quand le vent souffle fort, il siffle mélodieusement dans ces fameux pneumatophores, ces racines aériennes si caractéristiques. Alors on dirait que les cyprès chauves chantent. Chauve mais musicien, cet arbre est vraiment prodigieux…
Le parc du château de la Fontaine abrite également quelques cyprès chauves de taille majestueuse, plantés par Hector Léon Patas d’Illiers au début du XIXe siècle. Et sur la petite ile en face du moulin de la Mothe, vous pourrez apercevoir un groupe de cyprès chauves, plantés là par Xavier Dupont, qui fut un grand pépiniériste orléanais, amoureux des cyprès chauves et de son moulin de la Mothe qu’il a restauré et habité de longues années avec son épouse Annick.
Un trésor perdu, les « diamants d’Olivet »
Ainsi appelait-on de jolis cailloux de couleur, rouges, roses, verts, bleuâtres, d’un grain assez fin, que l’on trouvait dans le lit du Loiret. A la fin du XVIIIe et au début du XIXe siècle, les joailliers orléanais les recherchaient pour leur éclat et pour la facilité avec laquelle on pouvait les tailler.
Dans sa Description topographique d’Olivet, Beauvais de Préau écrivait : « Les cailloux connus sous le nom de diamants d’Olivet sont d’une belle eau et reçoivent un beau poli. Il y en a des jaunes d’un éclat très vif, et l’on assure qu’on en apporta, il y a bien des années, au seigneur de la Source, un de couleur bleue, de la plus grande beauté. Ces cailloux sont des quartz cristallisés et roulés. » Il nous apprend également « qu’un curé d’Olivet en a fait faire une couronne pour le Soleil de son église. »
En 1900, ces jolis cailloux étaient devenus très rares dans le Loiret trop encombré d’herbes et de vases.